Beau projet d’un lieu de création artistique, le Logelloù, sis à Penvénan, fait la fête du 16 au 18 août. Durant ces trois jours, 16 spectacles sont proposés allant de la conférence dansée au dîner-spectacle en passant par le clown et la musique, avec entre autres un concert de Philippe Ollivier, initiateur du lieu.
Au cœur de cette riche programmation, un spectacle vu et grandement apprécié par La Griffe : L’Île de T., de Pascal Rueff. Un voyage en son binaural sur une île mystérieuse, où les chats ronronnent, où les planches craquent et l’orage tonne, où la vie veut être plus forte que le monde qui la ronge. Le son binaural ? Une technique d’enregistrement en stéréo, deux micros dans les oreilles d’une tête-mannequin, qui permet de restituer au spectateur, coiffé d’un casque, un son en trois dimensions dont le rendu va bien au-delà de tous les gadgets prétendant « spatialiser » votre chaîne hi-fi. Dans les mains expertes de Pascal Rueff, c’est cependant bien plus qu’une technique. Ici, la précision est au service de la poésie, et si l’on vous chuchote dans l’oreille de trois-quarts arrière, ça n’est pas pour vous impressionner : c’est parce qu’on a quelque chose à vous dire. Quelque chose de beau, quelque chose de poignant.
Au centre de l’espace scénique — ici le Sonophore conçu et construit sur place, mais le spectacle se joue aussi en appartement —, une structure au centre de laquelle figure Vlad, le mannequin qui a servi aux enregistrements, là-bas dans l’Île de T. Vlad n’est pas là pour faire de la décoration : Pascal Rueff parle et Morgan Touzé chante autour de lui, s’en servant comme moyen de mêler les sons et les mots produits en live avec ceux enregistrés au préalable. La création sonore est donc à la fois issue de bandes réalisées sur le terrain et en studio (belle voix caverneuse d’Alfred Tomosi) et du jeu en direct de deux comédiens sensibles.
Il y a quelques années, Pascal Rueff avait créé Mort de rien. Sans le son binaural, mais également avec Morgan Touzé (chant et harpe) et Philippe Ollivier (bandonéon). Avec, surtout, la même intention poétique. C’était déjà un voyage, dont le lieu était clairement identifié. On y revient dans L’Île de T., sans dire exactement où l’on va, et l’on se gardera bien de le divulguer ici. Non que la destination ne compte pas, mais c’est le voyage qui est essentiel. Ainsi que la manière dont on l’entreprend. Mort de rien, c’était frontal et ça faisait l’effet d’une grande claque; L’Île de T. vous entoure, genre caresse. À chaque fois, la même impression : du grand art.